Comment as-tu préparé et élaboré ce projet, les histoires, le découpage ? As-tu adapté ton dessin ?

J’ai certainement adapté le dessin puisque j’aime beaucoup réfléchir au style d’un dessin par rapport à ce que je raconte. C’est très important pour moi. J’étais un peu traumatisé par les gens de la génération précédente qui avait repris des styles humoristiques franco-belge pour raconter des histoires qui n’avaient rien de rigolo. Ça, c’était un peu bizarre pour moi. J’ai donc toujours voulu adapter non seulement mon style mais aussi ma technique : ma mise en couleur ainsi que ma palette d’éclairage ou de matière sont adaptées au sujet de mes scénarios. Pour Little Némo, ce qui s’est imposé c’est la couleur, c’est d’avoir une sorte de flamboyance dans la couleur. Quand on a la fraîcheur d’un petit garçon de 10 ans, je pense en tous cas que c’était mon cas quand j’avais cet âge-là, je pense que les sensations par rapport au réel qui nous entoure sont extrêmement fortes. Je me rappelle de la manière dont je ressentais le soleil en été et des éblouissements, de l’impression des couleurs. C’étaient des choses extrêmement fortes, plus fortes qu’en tant qu’adulte. Il fallait donc que ce soit aussi dans ses rêves que je dessinais. Bien entendu pour le découpage, il y avait une sorte de liberté traditionnelle dans Némo. Il fallait bien explorer encore les moyens de la bande dessinée, des cadres, des passages d’une case à l’autre, d’un dessin qui se retrouve en dessous de toutes les cases. Comme c’est le cas pour le grand tigre qui est sur les deux pages. Ce sont des choses très gaies à orchestrer. Ce n’est pas forcément facile, mais je ne voulais pas m’en priver. Certainement pas. Il y a une réflexion sur la forme à donner à ces pages-là et puis aussi beaucoup de liberté. Cela fait partie du contrat.